Site web du sculpteur Kikoff.
04 février 1998, jour maudit, meurtrier, point de départ d’une métamorphose décadente.
Perdre pied, rester k.o debout, refuser d’y croire, affronter la réalité.
Visions insoutenables, violentes, indélébiles.
Dépouille maternelle blessée, strangulée par un assassin, disséquée pour autopsie.
Respirer la mort, en être imprégné.
Putréfaction d’un corps à l’abandon, odeur indescriptible, incomparable.
Condamnation sommaire, maudire la justice, injuste, se sentir impuissant.
Impossible de parler, juste crier, alors se taire.
Regretter le temps perdu, pudeur des confidences mutuelles, retenue affective stupide.
S’isoler, fuir le regard de l’autre.
Se submerger de travail, s’épuiser, quérir le sommeil réparateur, en vain.
Réveils impromptus, inondés de sueur, ruisselants d’angoisse, de rancÅ“ur.
Errances nocturnes, écrire des mots, inutiles, nul ne les lira jamais.
Fumer de l’herbe à outrance, s’anesthésier le cerveau, ne plus penser.
Courir, sentir son corps bouillir, courir encore et transpirer sa haine.
Dépossédé du naturel insouciant, devenir un autre, malgré soi.
Etancher la soif vengeresse, envahissante, apaisement suprême de la douleur.
Rassasier l’instinct primaire du talion, obsessionnel, se faire bourreau d’un jour.
Devoir renoncer, à regret, par raison, se sentir lâche, puant d’indignité, vomir son ego.
Haïr la terre entière, personne n’entend, rien d’anormal.
Subir ses émotions, déprimer, exploser de colère dans un raz de marée de larmes.
Perdre l’appétit, regarder son corps fondre, ne pas se battre.
Songer au pire, s’endormir pour toujours, trouver la paix, enfin.
Mettre un terme aux surgissements anarchiques d’images macabres.
Manquer de courage, d’égoïsme, ingrédients indispensables à l’acte.
Le temps qui court, 4 années qui passent.
Un matin de printemps, la sculpture s’impose, inattendue, inexpliquée.
Mutation artistique, instinctive et passagère d’une révolte intérieure.
Inspiration puisée dans le tumulte de l’adversité.
La main prend la parole, l’esprit dicte le geste, lent, maladroit.
Les maux se figent peu à peu, dans la pierre, dans la terre crue.
Traduction silencieuse et méditative d’une détresse colérique.
Parenthèse, refuge exutoire, antidote au silence des sentiments étouffés.
Découverte solitaire et regrettable de la maîtrise d’un art.